On entend souvent parler du saké comme un 'vin de riz', ou le 'vin japonais'. Pourtant, si le vin et le saké sont deux 'frères', ce ne sont pas des jumeaux pour autant.
Des matières premières différentes
Les deux modèles divergent en premier lieu au niveau des matières premières. Le vin est alcool de fruit (le raisin), tandis que le saké est un alcool issu d'une céréale (le riz). Si l'eau est un des ingrédients principaux du saké (les tojis sont obligés d'en ajouter sinon il ne serait tout simplement pas liquide), ce n'est pas le cas du vin dont le liquide provient des grains de raisins pressés. Et contrairement au saké, le vin n'a pas besoin de l'ajout d'un ferment (le koji-kin pour le saké) pour faciliter la fermentation. Il suffit d'ajouter des levures au moût. Le vin et saké sont cependant deux boissons obtenues par fermentation alcoolique à l'aide de levures. Mais c'est aussi le cas de la bière ou cidre. Ils peuvent tout deux être tranquilles (sans bulles), ou effervescents.
Si le type de raisin, ou cépage utilisé par le vigneron pour élaborer son vin est de première importance dans la définition de son goût final, de son identité gustative, c'est moins clair pour le saké.
Par exemple, si un amateur ou une amatrice un peu affûtée reconnaitra facilement des cépages comme le riesling, le chardonnay ou le sauvignon dans un vin, il lui sera plus difficile de reconnaitre le yamada nishiki ou l'iwai dans un saké. Même si cela reste possible, comme en témoignent par exemple les expérimentations de la maison Takeno avec le kamenoo.
Terroir or not terroir
De même, si la notion de terroir est très présente dans le vin, elle l'est peu dans le saké. En effet, le raisin est un fruit qui absorbe fort bien les propriétés du sol dans lequel est plantée la vigne (sols calcaires, marneux, argilocalcaires, volcaniques, sableux…) et qui est particulièrement sensible au climat qui l'entoure (sec, humide, salin…). C'est aussi le cas du riz, mais dans une moindre mesure. Dans le saké, le 'terroir' résiderait plutôt dans un ensemble qui comprendrait la variété de riz utilisée, le type d'eau, de levures et surtout les techniques utilisées par le toji.
Des modes de consommation qui tendent à se rejoindre
Les degrés alcooliques du saké, et du vin sont assez similaires. En moyenne, le vin titre 13°, le saké 16°.
Les sakés sont dans leur grande majorité, à consommer les dans les mois qui suivent leur élaboration. Dans imaginaire collectif, le vin est au contraire une boisson qu'on doit faire vieillir avant de le boire. Ces deux assertions sont vraies, mais doivent être fortement nuancées. Les vins 'nouveaux', comme le beaujolais nouveau par exemple, se boivent dans l'année de leur conception (2 mois seulement après les vendanges !). La plupart des vins rosés sont bus l'année qui suit la vendange, donc à partir de janvier ou février. Plus généralement, si les grands vins (champagne, Bordeaux, Bourgogne…) peuvent se bonifier des années, voire des décennies en bouteilles avant d'atteindre leur apogée, la tendance générale est à la dégustation de vin de plus en plus sur leur jeunesse.
A l'inverse, si le saké est bel est en règle générale une boisson qu'il ne fait pas bon trop faire attendre avant de la déguster… de plus en plus de maisons expérimentent des vieillissement de plusieurs années, en bouteille ou même en fûts.
Certains sakés sont mêmes vieillis plusieurs années dans des fûts ayant contenu… du vin ! Comme le Masuizumi Van Gaihen par exemple. Les moments de consommation du saké, et du vin tendent aussi à se rejoindre. Ils peuvent tous deux (selon leur type) se déguster à l'apéritif, pendant le repas, ou même en digestif.
Et la dégustation ?
Au niveau dégustation il y a des similitudes, mais aussi des différences marquées. Par exemple contrairement au vin, le saké peut se boire tiède ou chaud (si on exclut le vin chaud sur les pistes de ski bien sûr !). Certains sakés (traditionnels) ne recherchent pas du tout la longueur en bouche comme les vins de qualité, mais plutôt la fulgurance, l’évanescence de l’instant… On retrouve cependant des marqueurs gustatifs communs à certains sakés modernes (arômes de fleurs blanches, de fruits…) dans des vins blancs ou rosés. Les arômes des sakés natures (champignons, arômes fermentaires…), peuvent être communs avec les arômes des vins natures.
Si les vins doivent toujours être dégustés dans des verres… à vin, pour donner le meilleur d'eux-mêmes, ce n'est pas toujours le cas du saké. Certains, comme les sakés modernes s'épanouiront dans des verres à vin, d'autres comme nombre de sakés traditionnels s'y perdront et seront à servir dans les coupes traditionnelles que sont les ochokos et les sakazukis.
Au final, si vin et saké sont bien différents, il ne convient pas de les opposer puisque les amateurs et amatrices de vins sont souvent fans de saké et inversement.
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